Tuesday, September 06, 2005

La précarité : un nouveau principe d'humanité

(...) Vous ne pouvez pas avoir un emploi correctement rémunéré, exercé dans des conditions qui ménagent votre santé physique et psychique, avec suffisamment de stabilité, d’avantages matériels et de temps libre pour que le jeu en vaille la chandelle? Vous aurez des emplois éreintants, qui détruiront votre corps et lamineront votre esprit, morcelleront et envahiront votre temps, vous interdiront tout projet d’avenir, et vous devrez parfois en cumuler plusieurs pour grappiller une petite aumône vous permettant de survivre, à défaut de vivre – vivre? Et puis quoi, encore?... (...) Mona Chollet.
L'université d'été 2005 du Medef s'est déroulé sous le slogan de "Réenchanter le monde". C'est fou comme ça a des accents des grandes messes en l'honneur du travail socialiste dans les ex-pays communistes : (...) Récemment, j'étais invité dans une école de commerce à Nantes. C'est vraiment un de ces lieux ultra modernes où l'on a l'impression de se retrouver dans un temple du libéralisme. Face à un amphi plein, j'ai déclaré de but en blanc que le libéralisme, aujourd'hui, a emprunté au communisme presque tous ses défauts. Surprise des étudiants. J'ai dix arguments à l'appui de cette thèse, voulez-vous que j'en développe quelques-uns ? Et je me suis lancé : on vous apprend que le plus important c'est l'économie, et que le reste est secondaire. Le marxisme disait la même chose, on sait sur quoi ça a débouché. On vous dit aussi que si une économie ne marche pas bien, c'est que le système n'est pas assez libéral, qu'il faut déréguler, flexibiliser. Dans les pays communistes, ça ne marchait pas non plus, parce qu'on n'était pas encore assez communiste, pas assez collectivisé. La promesse d'un marché parfait parce que dérégulé, débarrassé de toute rigidité, ressemble aux lendemains qui chantent et à l'avenir radieux promis par le communisme. (...) Jean-Claude Guillebaud.
Lors de cette université d'été, Laurence Parisot, nouvelle présidente du Medef a notamment déclaré que "la précarité était une loi de la condition humaine" et que "le mot précarité est un mot à la mode qui a pour objectif de nous empêcher de réfléchir". Empêcher de réfléchir à quoi ? Au fait que les hommes ont le droit de mettre l'homme avant l'entreprise ? Au fait que l'homme est le seul animal qui n'accepte pas sa condition ( de précaire ) et qui travaille à faire disparaître cette incertitude ? Au fait que les hommes ( même en acceptant le postulat de Laurence Parisot ) ont le droit de vouloir se solidariser pour justement éliminer cette précarité ? Au fait que l'homme soit le seul être vivant qui a le pouvoir de réflechir et d'agir sur son avenir et par conséquent de le choisiret le vouloir non précaire ? Déjà en 2002, Antoine Seillère avait déclaré que l'entreprise était la cellule de base de la société. Le Medef et les dogmatiques du libéralisme sont en train de réinventer tous les concepts de la sociologie et de la philosophie.
En tous cas, la loi de la condition humaine qu'est la précarité, 250 000 habitants de Nouvelle Orléans auraient bien aimé la démentir. Des études ont été faites sur les conséquences d'un ouragan de la puissance de Katrina sur la capitale de la Louisiane. Il était prévisible qu'au moins 250 000 habitants de la ville ne pourraient pas évacuer leurs maisons pour la simple raison qu'ils n'en auraient pas les moyens. Pas assez de moyens et d'argent pour acheter une voiture et quitter la ville. Tout ça à cause de cette sacré loi de la condition humaine qu'est la précarité.
Etre précaire ou ne pas être, telle est la question.
Etre précaire, c'est crier après vos enfants parce qu'ils veulent acheter tous les gadgets qu'ils voient à la télé
Etre précaire, c'est trouver un travail et le refuser parce que vous n'avez pas de crêche pour votre enfant ou que vous n'avez pas les moyens de payer une nounou.
Etre précaire, c'est espérer que votre mal de dents disparaisse....
La suite ( en anglais )

Bande son : Armagideon Time ( The Clash ) : A lot of people won't get no supper tonight