Alger, la corsaire
Voici Alger et sa légende. Ses racines étranges et tenaces s'emmêlent dans l'imaginaire. C'est comme un corps mystérieux et inexploré que la main experte d'un amoureux dévoilerait peu à peu. Pour l'oeil non averti, la ville est tout simplement posée comme une vieille selle de cavalier sur le dos noueux et tordu des monts de kabylie. Le port, rempli de vaisseaux venus des quatre coins du monde, résonne de mille langues étrangères, dans un halètement et un bruissement ininterrompu d'hommes et de vagues. Une ville qui se nourrit de sang et d'eau salée, en équilibre précaire entre une ascension vertigineuse et la ruine la plus totale. Une humanité qui se présente sous sa forme la plus crue, la plus désespérée, si bien que l'on ne peut s'empêcher d'être partagé entre le ravissement et la nausée. Il est certain que ce port a la plus étrange réputation du monde, et il ne fait pas bon s'y aventurer à la légère. C'est là que rôdent les légendes de Barberousse et d'Euldj Ali. C'est là, entre le lever et le coucher du soleil, qu'un homme peut devenir roi, faire fortune, ou, si le sort en a décidé autrement, perdre tout ce qu'il possède, y compris sa vie. On peut trouver absolument tout ce que l'on veut dans les entrailles tortueuses de la casbah où beaucoup se sont bel et bien égarés. Une ville où les corsaires et les flibustiers, les marchands et les négriers se sont mis à l'abri pour se faire une place au soleil. Ce n'était plus l'époque des grands empires et des grands rois, mais plutôt celle des petits tyrans, des intermédiaires voraces et des bureaucrates pleins de suffisance. Le Dey devait allégeance à Istanbul, mais il le faisait du bout des lèvres, car les dômes bleus et le divan étaient derrière l'horizon. Tout comme la casbah marquait la séparation entre les dirgeants et le peuple d'Alger, la puissance Méditerranée servait de frontière entre le sultan et les avant-postes de son empire sur les rivages d'Afrique du Nord.
Djamel Mahjoub, Le téléscope de Rachid, Babel.
Texte posté en pensant à une personne qui aime beaucoup Alger.
Bande son : Bâaziz - Café de l'indépendance.
Djamel Mahjoub, Le téléscope de Rachid, Babel.
Texte posté en pensant à une personne qui aime beaucoup Alger.
Bande son : Bâaziz - Café de l'indépendance.
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