Intimité contre lien
(...) ...[ ] cet imaginaire collectif est boulversé par une étonnante inversion des valeurs. L'exhibition de l'intimité, jadis redoutée et contrainte, devient une démarche non seulement spontanée mais valorisée comme la réalisation d'un quasi-droit de l'homme. Les choses semblent cul par dessus tête. Par le canal des médias, un prurit d'aveu volontaire remplit soudainement l'air du temps de confidences inimaginables et de confessions extrêmes. Il faut clamer ce qu'on est. A tout prix. Aucun sujet ne doit pouvoir à cette confession requise : ni la sexualité, ni les secrets de famille, ni les désarois psychologiques, et surtout pas les fantasmes habitant nos têtes. Le deuil lui-même, affaire personnelle, s'il en est devient une démarche à la fois technique et publique...[ ]... Notre modernité des médias et des écrans réussit ce prodige d'inciter chacun à se livrer spontanément, à se mettre à nu, sans nul besoin de la contrainte physique, de la torture ou de la menace de châtiment (...)
La nouvelle morale qui prévaut nous enjoint de dépasser la honte et la culpabilité pour s'offrir courageusement au regard d'autrui. Profession de foi très simple : " Je n'ai rien à cacher. Je vous montre et je vous dis tout!"...[ ] ...Le secret, le silence; l'écart volontaire n'ont plus la faveur du langage courant. Il faut qutidiennement "lever le voile", "briser les silences", "avouer" son homosexualité ou son goût immodéré pour le chocolat. C'est ainsi qu'on a pu parler d'une lente et irrésistible dissolution de l'espace privé dans l'espace public...[ ] ..."Plus je suis transparent, plus je risque de me trouver moi-même". Cette quête un peu panique du regard de l'autre, ce besoin d'extériorisation pour se sentir exister répondent confusément à la brisure du lien ( social, familial, de voisinage, etc...). La transparence du moi, l'exposition frénétique de chacun au regard de tous les autres, voilà une façon comme une autre de retrouver le partage, l'alliance et le lien en mettant en mettant en quelque sorte l'intimité sur la table. (...)
Jean-Claude Guillebaud, Le goût de l'avennir, pp 146-149, Seuil 2003.
Encore, il ne connait pas les blogs ;-) [ enfin je suppose]
L'intimité serait-elle la seule monnaie d'échange pour retrouver des liens ?
La nouvelle morale qui prévaut nous enjoint de dépasser la honte et la culpabilité pour s'offrir courageusement au regard d'autrui. Profession de foi très simple : " Je n'ai rien à cacher. Je vous montre et je vous dis tout!"...[ ] ...Le secret, le silence; l'écart volontaire n'ont plus la faveur du langage courant. Il faut qutidiennement "lever le voile", "briser les silences", "avouer" son homosexualité ou son goût immodéré pour le chocolat. C'est ainsi qu'on a pu parler d'une lente et irrésistible dissolution de l'espace privé dans l'espace public...[ ] ..."Plus je suis transparent, plus je risque de me trouver moi-même". Cette quête un peu panique du regard de l'autre, ce besoin d'extériorisation pour se sentir exister répondent confusément à la brisure du lien ( social, familial, de voisinage, etc...). La transparence du moi, l'exposition frénétique de chacun au regard de tous les autres, voilà une façon comme une autre de retrouver le partage, l'alliance et le lien en mettant en mettant en quelque sorte l'intimité sur la table. (...)
Jean-Claude Guillebaud, Le goût de l'avennir, pp 146-149, Seuil 2003.
Encore, il ne connait pas les blogs ;-) [ enfin je suppose]
L'intimité serait-elle la seule monnaie d'échange pour retrouver des liens ?
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