Monday, March 10, 2008

Images démocratiques


La presse algérienne, par l'intermédiaire de journalistes ou d'universitaires, alimente constament le débat sur la révision de la Constitution qui pourrait permettre à Bouteflika de briguer un troisième mandat. Si en général les arguments contre cette révision sont bien présentés et bien étayés, par contre dès qu'il s'agit de montrer des modèles ou d'exemples de "pays démocratiques" (ou pas d'ailleurs) que l'Algérie pourrrait suivre et dont elle devrait s'inspirer, c'est la catastrophe. Quelques exemples.

(...)Le monde bouge tellement que les Etats-Unis d’Amérique sont à l’orée peut-être d’avoir un Président noir de peau ; cependant que l’Algérie s’englue dans une relance, à cinq saisons d’échéance, d’un troisième mandat que M. Bouteflika n’a même pas supputé vouloir. Mais sa cour, dite d’Alliance présidentielle, couvant deux courtisans de première classe, Premiers ministres, dont un en exercice, a sans doute besoin d’une permanente agitation à humilier le droit ; aujourd’hui celui de tordre le cou à la Constitution, avatar d’un coup d’état permanent à la celle de l’après indépendance. Histoire, visent ils, Belkhadem et Ouyahia, de lui faire pondre au texte le costume sur mesure à l’un d’entre eux pour briguer le poste de vice- Président. Seul moyen dans le monde arabe où tous les présidents à vie ont des dauphins de progéniture, contrairement à l’Algérie, de se placer en position de toucher le jack pot d’un jeu manigancé à l’ombre de la hiérarchie militaire, en remake de 1999 et 2004. (...)
"Le mépris du Droit" ; Belkacem Mostefaoui - El Watan, 31 Janvier 2008.

Pour l'exemple d'Obama, je suis tenté de dire : "Ouf, il était temps pour une démocratie sensée avoir plus de 2 siècles d'existence". Les Algériens ont le temps de voir venir, sachant en plus le demi-siècle algérien est indépendant, et qu'il ne peut pas être qualifié démocratique. Alors pour l'exemple obamesque il faudra repasser.
Du point de vue "humiliation du droit", le journaliste doit choisir. Soit il considère que le pouvoir (Président et chambre représentatives - Parlement et Seénat) en place est légitime et considère que donc l'Algérie fonctionne comme un Etat de droit, et dans un Etat de droit, la révision de la Constitution n'est pas un mépris du droit mais au contraire un excercice de ce même droit. Du coup si cette révision est proposée par le gouvernement et est votée par des instances élues, tout est bien qui finit bien. Le second choix est facile : soit l'existence de ce pouvoir même est une négation du droit, du coup pourquoi se lamenter sur la violation du droit par un pouvoir illégitime ? Ne faut-il pas mieux refuser ce pouvoir directement et au lieu de mener les lecteurs en bateau.

[voir image plus haut]
(...) Malgré le visage néocolonialiste, agressif et fort hideux des USA de Dick Cheney et de la clique des néocons, des arrêts sur images provenant d’outre-Atlantique nous laissent, nous autres Algériens, tout admiration, complètement impressionnés. Y a-t-il « démocratiquement » plus beau à voir que ces quatre ex-présidents américains assistant ensemble, en invités d’honneur, aux cérémonies d’investiture de J. W. Bush fils ? Messieurs B. Clinton, J. W. Bush père, J. Carter et le feu G. Ford étaient assis côte à côte avec les ex-premières dames bien sûr, décontractés tous, flamboyants, tout sourire, élégance et bonne santé. Décidément, ils ne peuvent prétendre avoir rempli leur mission sans tenir, en cette occasion publique précise, les mains de leurs épouses et les couver de tous les chaleureux sourires, de tendresse, d’amour et de gratitude. Aurions-nous la veine de voir, lors de notre misérable vie terrestre, de telles scènes se reproduire dans notre Algérie ? Malheureusement, c’est du domaine de l’irréalisme confirmé, le pouvoir actuel a manifestement d’autres modèles et références, tous ses yeux sont braqués, ailleurs, du côté de l’Orient féodal. (...)
"Pour la protection de l’alternance en Algérie" ; Abderahmane Hamida - Universitaire 3 Mars 2008

Quand j'ai lu ça, je ne savais plus si j'avais envie de rire ou de pleurer. A la vue de cette photo, c'est un tout autre vocabulaire que celui de cet "universitaire" ( décidement l'université algérienne est bien mal en point) béat d'amiration devant l'image de la démocratie Us (sic).
Au lieu de démocratie, d'admiration, de mission remplie, de tendresse, d'amour, de gratitude ou de chaleureux sourires, je pense à terreur, violence, colonisation, dégoût, hypocrisie, hyènes, mains pleines de sang. Je pense à tous les enfants vietnamiens morts sous Gérald Ford. Je pense aux 500 000 enfants irakiens morts sous embargo de Clinton et de Bush père. Je pense à l'intervention de Reagan à Grenade, au Paraguay, au Nicaragua, etc .. Je pense à toutes les dictatures saguinaires soutenues par tous les présidents US. Je pense notamment aux distatures de l'Orient féodal (que semble exécrer notre universitaire) soutenues depuis toujours par tous les présidents US.
(...)Les partisans du troisième mandat évitent soigneusement de citer en exemple ces dirigeants étrangers qui se sont confectionnés des constitutions à leur image, particulièrement dans le tiers monde : ils ont une trop mauvaise presse. Avec toute sa puissance, Poutine n’a pas franchi le pas de modifier la Loi fondamentale de son pays, préférant un subterfuge politique pour rester le maître de la Russie. Mais Poutine a cet avantage d’être aimé par son peuple qui reconnaît haut et fort être sorti, grâce à lui, de la précarité sociale et du désespoir de la vie. (...)
"Ça se bouscule..." ; Ali Bahmane - El Watan - 03 Mars 2008
En fait, ce qui gêne notre journaliste ce n'est pas que Bouteflika veuille un troisième mandat, mais que pour ce faire il envisage de changer la Constitution. S'il procède comme Poutine et surtout s'il est "aimé" du peuple (comme Poutine-sic) , il peut rester maître de l'Algérie comme bon lui semble. En passant, il pourrait imiter Poutine : limitations de toute presse d'opposition, au besoin élimination de quelque journalistes, muselage de l'opposition poltique, main basse sur les ressources pétrolières et gazières, etc [Bien sûr je ne parle pas de Tchétchénie]... Bizarre, il me semble que tout ceci est déjà en vigueur en Algérie ( sauf l'assassinat de journalistes, ils sont "seulement" emprisonnés) ... Il faut croire qu'il y a vraiment que cette question cache-misère de révision de la Constitution qui chagrine monsieur Ali Bahmane. Il n'est nullement préoccupé par la démocratie.
Franchement, moi je trouve que les "démocrates" (tous les journalistes algériens se disent démocrates) algériens sont dangeureux.