Wednesday, October 10, 2007

Une élue qui cache des sans-papiers


Non, il ne s'agit pas de Fadéla Amara.

Interview d'une élue dans LibéLyon qui parle comment elle a été confrontée à des sans-papiers et comment on ayant appri à mieux les connaitre et connaitre leurs situations, elle en est venu à en cacher une chez elle.


(...) A partir de cette rencontre, je me suis ouverte sur les questions d’immigration, d’asile, qui n’étaient pas au cœur de mes engagements. J’étais plus à l’écoute de ces situations, et des personnes qui soutiennent les sans-papiers. J’ai aussi pris conscience des injustices dans l’application de certaines lois. Il y a une part d’aléatoire, d’arbitraire, dans les décisions de l’Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) et des circulaires de régularisation. Je me retrouve aujourd’hui dans les positions de certains élus comme la sénatrice Christiane Demontès. Il faut réclamer l’examen des situations au cas par cas, pas au compte-goutte. La dame que j’ai rencontré en 2005 était par exemple arrivée de RDC en même temps qu’une compatriote. Malgré ce qu’elle avait subi, l’autre a obtenu un statut en quelques mois, elle non. En l’accompagnant au service des étrangers de la préfecture, j’ai aussi parfois eu la nausée devant les arguments que j’ai entendus. J’ai réalisé qu’une administration peut à tout moment se mettre au service d’un projet politique. Sans comparer ce qui n’est pas comparable, je comprends mieux comment Vichy a pu se mettre en place, article de loi respecté après article de loi respecté. (...)


Tuesday, October 09, 2007

Fadéla Amara : C'est vraiment "dégueulasse" d'être aussi nulle

Libération : Fadela Amara juge «dégueulasse d'instrumentaliser l'immigration».
(...) «L'ADN je ne suis pas d'accord parce que je pense qu'on touche à quelque chose qui n'est pas bon pour notre pays, a déclaré Mme Amara. Je le dis aussi en tant que fille d'immigrés: y en a marre qu'on instrumentalise à chaque fois l'immigration, pour des raisons très précises. Je trouve ça dégueulasse!». (...)
(...) «Je suis une femme libre, ne l'oubliez jamais», a fait valoir Mme Amara. «J'ai la possibilité de dire ce que j'ai à dire et, très franchement, le jour vraiment où ce sera trop insupportable, le jour où ce sera trop dur, eh bien je partirai !» (...)

Quelle force et quelle conviction de la part de Fadéla Amara dans sa révolte contre l'intrumentalisation de l'immigration par la droite raciste et xénophobe que représente Mr Hortefeux, non ? Elle menace même de partir si ça devient trop insupportable. Trop forte Fadéla Amara. Elle est sur les traces de Rosa Luxembourg cette petite fille d'immigré. Franchement ça m'épate, autant de culot et de détermination. Avoir le courage de menacer de quitter un gouvernement qui institue un racisme d'état, un gouvernement dont le président-premier ministre a élevé l'instrumentalisation de l'immigration et de la peur de l'étranger au rang d'art. Un gouvernement, que même des socialistes farouches rêvent de rejoindre ou regrettent de ne pas avoir rejoint. Rosa Park a refusé de céder sa place dans le bus, Fadéla Amara menace de céder son fauteuill de ministre. L'histoire de l'immigration marquera cette intention d'une pierre blanche.


Friday, October 05, 2007

Comment installer la démocratie en Afghanistan ?

Les conservateurs canadiens du toutou canadien de Bush, Stephen Harper, ont trouvé la solution. Faire écrire les discours de président afghan, Ahmed Karzai par les militaires canadiens.

OTTAWA (Reuters) - A speech that Afghan President Hamid Karzai delivered to Canada's Parliament a year ago, urging the country's continued military support, was nothing more than a "political stunt," written by Canadian defense ministry staff, an opposition party charged on Tuesday.

Ahmed Karzai avait fait un discours il y a un an devant le Parlement canadien. Discours dans lequel il justifait la présence militaire canadienne en Afghanistan. Ce discours avait été écrit par un groupe de fonctionnaires du ministère de la défence canadien.
A ce stade là, on ne peut plus parler de carpette pour Karzai, mais de balai de chiottes.

Thursday, October 04, 2007

Y'a-t-il une vie après le libéralisme ? Interview de Jean-Claude Michéa

Excellente interview de Jean-Claude Michéa sur le Nouvel Observateur. P... qu'est-ce que ça change de la rénovation de la gauche, version Mehdi Ouraoui.

Extraits :

(...) Le problème, c'est qu'en décidant d'évacuer ainsi toute référence à des valeurs morales partagées on élimine aussi ce qu'Orwell appelait la common decency, c'est-à- dire ces vertus humaines élémentaires que sont, par exemple, la loyauté, l'honnêteté, la bienveillance ou la générosité.
Or ces vertus, qui s'enracinent depuis des millénaires dans ce que Mauss nommait la logique du don, ne sauraient être confondues avec les constructions métaphysiques des fanatiques du «Bien». (...)


(...) - Je dirais qu'il s'agit de construire progressivement un «contexte» politique, social et culturel qui favorise indirectement les dispositions à l'égalité, l'entraide et l'amitié plutôt qu'à l'égoïsme ou à la guerre de tous contre tous. Cela n'a rien d'utopique. Qu'est-ce qui favorise, dans nos sociétés libérales, les progrès de l'égoïsme ou du désir de «réussir» au détriment de ses semblables? C'est bien tout le contexte mis en place par la civilisation juridico-marchande, à travers son urbanisme, son organisation du travail, ses structures éducatives, sa propagande publicitaire ou son industrie de l'«information» et du divertissement. (...)

(...) C'est ce que j'essaie de dire! Une communauté humaine ne peut tenir au quotidien que si elle puise dans ce que Castoriadis appelait des «gisements culturels» étrangers à la logique libérale, comme par exemple un minimum de dispositions culturelles à la confiance, à la générosité, au sens du bien commun. Le problème, c'est que la société juridico-marchande ne peut se développer sans assécher progressivement ces gisements, de la même manière que la Croissance économique illimitée implique parallèlement la pollution et l'épuisement des ressources naturelles de la planète. (...)

Wednesday, October 03, 2007

Edward Saïd sur Albert Camus

Le 25 septembre 2003, Edward Saïd nous quittait à l'âge de 63 ans. Trop jeune pour partir alors que le monde arabe a tant besoin de lui. Quand on sait que Chomsky va avoir 80 ans l'année prochaine et qu'il est toujours aussi actif, on ose rêver de ce que Saïd aurait apporté.
Il est donc de notre devoir de maintenir vivante sa pensée. Aussi, je poste ici un article sur Camus paru dans Le Monde Diplomatique en novembre 2000.


Albert Camus, ou l’inconscient colonial


Après L’Age des extrêmes, d’Eric Hobsbawm, Le Monde diplomatique publie - cette fois avec Fayard - Culture et impérialisme, d’Edward W. Said. Dans ce livre, également inédit en français, le grand intellectuel américano-palestinien démontre comment l’œuvre majeure de grands écrivains occidentaux n’échappe pasà la mentalité coloniale de leur temps. Exemple : Albert Camus.

Albert Camus est le seul auteur de l’Algérie française qui peut, avec quelque justification, être considéré comme d’envergure mondiale. Comme Jane Austen (1) un siècle plus tôt, c’est un romancier dont les œuvres ont laissé échapper les réalités impériales qui s’offraient si clairement à son attention. (...)

Camus joue un rôle particulièrement important dans les sinistres sursauts colonialistes qui accompagnent l’enfantement douloureux de la décolonisation française du XXe siècle. C’est une figure impérialiste très tardive : non seulement il a survécu à l’apogée de l’empire, mais il survit comme auteur « universaliste », qui plonge ses racines dans un colonialisme à présent oublié. (...)

Le parallèle frappant entre Camus et George Orwell (2), c’est qu’ils sont tous deux devenus dans leur culture respective des figures exemplaires dont l’importance découle de la puissance de leur contexte indigène immédiat qu’ils paraissent transcender. C’est dit à la perfection dans un jugement sur Camus qui survient presque à la fin de l’habile démystification du personnage à laquelle se livre Conor Cruise O’Brien, dans un livre qui ressemble beaucoup à l’étude de Raymond Williams sur Orwell (et paru dans la même collection, les « Modern Masters » (3).

O’Brien écrit : « Il est probable qu’aucun auteur européen de son temps n’a si profondément marqué l’imaginaire et aussi la conscience morale et politique de sa propre génération et de la suivante. Il était intensément européen parce qu’il appartenait à la frontière de l’Europe et était conscient d’une menace. La menace lui faisait aussi les yeux doux. Il a refusé, mais non sans lutte. Aucun autre écrivain, pas même Conrad, n’est plus représentatif de l’attention et de la conscience occidentale à l’égard du monde non occidental. Le drame interne de son œuvre est le développement de cette relation, sous la montée de la pression et de l’angoisse. »

(...) De plus, Joseph Conrad et Camus ne sont pas les représentants d’une réalité aussi impondérable que la « conscience occidentale », mais bien de la domination occidentale sur le monde non européen. Conrad exprime cette abstraction avec une force qui ne trompe pas, dans son essai Geography and Some Explorers (4). Il y célèbre l’exploration de l’Arctique par les Britanniques puis conclut sur un exemple de sa propre « géographie militante » : « J’ai posé le doigt au beau milieu de la tache, alors toute blanche, qu’était l’Afrique, et j’ai déclaré : “Un jour j’irai là-bas.” » Il y est allé, bien sûr, et il reprend le geste dans Au cœur des ténèbres.

Le colonialisme occidental, qu’O’Brien et Conrad se donnent tant de mal pour décrire, est, premièrement, une pénétration hors des frontières européennes et dans une autre entité géographique. Deuxièmement, il ne renvoie nullement à une « conscience occidentale » anhistorique « à l’égard du monde non occidental » : l’écrasante majorité des indigènes africains et indiens ne rapportaient pas leurs malheurs à la « conscience occidentale », mais à des pratiques coloniales très précises comme l’esclavage, l’expropriation, la violence des armes. C’est une relation laborieusement construite où la France et la Grande-Bretagne s’autoproclamaient l’« Occident » face aux peuples inférieurs et soumis du « non-Occident », pour l’essentiel inerte et sous-développé. (...)

O’Brien use aussi d’un autre moyen pour tirer Camus de l’embarras où il l’a mis : il souligne que son expérience personnelle est privilégiée. Tactique propre à nous inspirer pour lui quelque sympathie, car, si regrettable qu’ait été le comportement collectif des colons français en Algérie, il n’y a aucune raison d’en accabler Camus. L’éducation entièrement française qu’il a reçue là-bas - bien décrite dans la biographie de Herbert Lottman (5) - ne l’a pas empêché de rédiger, avant-guerre, un célèbre rapport sur les malheurs locaux, dus pour la plupart au colonialisme français. Voici donc un homme moral dans un contexte immoral. Et le centre d’intérêt de Camus, c’est l’individu dans un cadre social : c’est aussi vrai de L’Etranger que de La Peste et de La Chute. Ses valeurs, ce sont la conscience de soi, la maturité sans illusion, la fermeté morale quand tout va mal. Mais, sur le plan méthodologique, trois opérations s’imposent.

La première, c’est d’interroger et de déconstruire le cadre géographique que retient Camus pour L’Etranger (1942), La Peste (1947) et son recueil de nouvelles (du plus haut intérêt) L’Exil et le Royaume (1957). Pourquoi l’Algérie, alors qu’on a toujours considéré que les deux premières œuvres citées renvoyaient surtout à la France, et plus particulièrement à son occupation par les nazis ?

Allant plus loin que la plupart des critiques, O’Brien observe que le choix n’est pas innocent : bien des éléments de ces récits (par exemple le procès de Meursault [dans L’Etranger]) constituent une justification furtive ou inconsciente de la domination française, ou une tentative idéologique de l’enjoliver. Mais chercher à établir une continuité entre l’auteur Camus, pris individuellement, et le colonialisme français en Algérie, c’est d’abord nous demander si ses textes sont liés à des récits français antérieurs ouvertement impérialistes. (...)

La seconde opération méthodologique porte sur le type de données nécessaires à cet élargissement de perspective, et sur une question voisine : qui interprète ?

Un critique européen intéressé par l’histoire dira probablement que Camus représente l’impuissance tragique de la conscience française face à la crise de l’Europe, à l’approche d’une de ses grandes fractures. Si Camus semble avoir considéré qu’on pouvait maintenir et développer les populations de colons au-delà de 1960 (l’année de sa mort), il avait tout simplement tort historiquement puisque les Français ont abandonné l’Algérie et toute revendication sur elle deux ans plus tard seulement.

Lorsque son œuvre évoque en clair l’Algérie contemporaine, Camus s’intéresse en général aux relations franco-algériennes telles qu’elles sont, et non aux vicissitudes historiques spectaculaires qui constituent leur destin dans la durée. Sauf exception, il ignore ou néglige l’histoire, ce qu’un Algérien, ressentant la présence française comme un abus de pouvoir quotidien, n’aurait pas fait. Pour un Algérien, 1962 représentera probablement la fin d’une longue et malheureuse époque inaugurée par l’arrivée des Français en 1830, et l’ouverture triomphale d’une ère nouvelle. Interpréter du même point de vue les romans de Camus, ce serait voir en eux, non des textes qui nous informent sur les états d’âme de l’auteur, mais des éléments de l’histoire de l’effort français pour rendre et garder l’Algérie française.

Il faut donc comparer les assertions et présupposés de Camus sur l’histoire algérienne avec les histoires écrites par des Algériens après l’indépendance, afin d’appréhender pleinement la controverse entre le nationalisme algérien et le colonialisme français. Et il serait juste de rattacher son œuvre à deux phénomènes historiques : l’aventure coloniale française (puisqu’il la postule immuable) et la lutte acharnée contre l’indépendance de l’Algérie. Cette perspective algérienne pourrait bien « débloquer » ce que l’œuvre de Camus dissimule, nie ou tient implicitement pour évident.

Enfin, étant donné l’extrême densité des textes de Camus, l’attention au détail, la patience, l’insistance sont méthodologiquement cruciales. Les lecteurs associent d’emblée ses romans aux romans français sur la France, non seulement en raison de leur langue et des formes qu’ils semblent hériter d’aussi illustres prédécesseurs qu’Adolphe et Trois contes (6), mais aussi parce que leur cadre algérien paraît fortuit, sans rapport avec les graves problèmes moraux qu’ils posent. Près d’un demi-siècle après leur publication, ils sont lus comme des paraboles de la condition humaine.

C’est vrai, Meursault tue un Arabe, mais cet Arabe n’est pas nommé et paraît sans histoire, et bien sûr sans père ni mère. Certes, ce sont aussi des Arabes qui meurent de la peste à Oran, mais ils ne sont pas nommés non plus, tandis que Rieux et Tarrou sont mis en avant. Et l’on doit lire les textes pour la richesse de ce qui s’y trouve, non pour ce qui en a été éventuellement exclu. Mais justement. Je voudrais souligner qu’on trouve dans les romans de Camus ce qu’on en croyait autrefois évacué : des allusions à cette conquête impériale spécifiquement française, commencée en 1830, poursuivie de son vivant, et qui se projette dans la composition de ses textes.

Cette entreprise n’est pas inspirée par la vengeance. Je n’entends pas reprocher rétrospectivement à Camus d’avoir caché dans ses romans certaines choses sur l’Algérie qu’il s’efforce longuement d’expliquer, par exemple, dans les divers textes des Chroniques algériennes. Mon objectif est d’examiner son œuvre littéraire en tant qu’élément de la géographie politique de l’Algérie méthodiquement construite par la France sur plusieurs générations. Cela pour mieux y voir un reflet saisissant du conflit politique et théorique dont l’enjeu est de représenter, d’habiter et de posséder ce territoire - au moment précis où les Britanniques quittaient l’Inde. L’écriture de Camus est animée par une sensibilité coloniale extraordinairement tardive et en fait sans force, qui refait le geste impérial en usant d’un genre, le roman réaliste, dont la grande période en Europe est depuis longtemps passée. (...)

Souvenons-nous. La révolution algérienne a été officiellement annoncée et déclenchée le 1er novembre 1954. Le massacre de Sétif, grande tuerie de civils algériens par des soldats français, est de mai 1945. Et les années précédentes, celles où Camus écrivait L’Etranger, ont été riches en événements ponctuant la longue et sanglante histoire de la résistance algérienne. Même si, selon tous ses biographes, Camus a grandi en Algérie en jeune Français, il a toujours été environné des signes de la lutte franco-algérienne. Il semble en général les avoir esquivés, ou, dans les dernières années, traduits ouvertement dans la langue, l’imagerie et la vision géographique d’une volonté française singulière de disputer l’Algérie à ses habitants indigènes musulmans. En 1957, François Mitterrand déclarait sans ambages, dans son livre Présence française et abandon (7) : « Sans Afrique, il n’y aura pas d’histoire de France au XXe siècle. »

Pour situer Camus en contrepoint sur l’essentiel (et non sur une petite partie) de son histoire réelle, il faut connaître ses vrais prédécesseurs français, ainsi que l’œuvre des romanciers, historiens, sociologues et politologues algériens d’après l’indépendance. Aujourd’hui, une tradition eurocentrique parfaitement déchiffrable et persistante refoule toujours dans l’interprétation ce qui, sur l’Algérie, était refoulé par Camus (et Mitterrand), et refoulé par les personnages de ses romans. Quand, dans les dernières années de sa vie, Camus s’oppose publiquement, et même violemment, à la revendication nationaliste d’indépendance algérienne, il le fait dans le droit-fil de la représentation qu’il a donnée de l’Algérie depuis le début de sa carrière littéraire, même si ses propos font alors tristement écho à la rhétorique officielle anglo-française de Suez.

Ses commentaires sur le « colonel Nasser », sur l’impérialisme arabe et musulman, nous sont familiers, mais le seul énoncé politique, d’une intransigeance totale, qu’il consacre à l’Algérie dans ce texte apparaît comme un résumé sans nuance de tout ce qu’il a écrit antérieurement : « En ce qui concerne l’Algérie, l’indépendance nationale est une formule purement passionnelle. Il n’y a jamais eu encore de nation algérienne. Les juifs, les Turcs, les Grecs, les Italiens, les Berbères auraient autant de droit à réclamer la direction de cette nation virtuelle. Actuellement, les Arabes ne forment pas à eux seuls toute l’Algérie. L’importance et l’ancienneté du peuplement français en particulier suffisent à créer un problème qui ne peut se comparer à rien dans l’histoire. Les Français d’Algérie sont eux aussi et au sens fort du terme des indigènes. Il faut ajouter qu’une Algérie purement arabe ne pourrait accéder à l’indépendance économique sans laquelle l’indépendance politique n’est qu’un leurre. (...) »

Le paradoxe est que partout où, dans ses romans et descriptions, Camus en parle, la présence française en Algérie est rendue soit comme un thème narratif extérieur, une essence échappant au temps et à l’interprétation, soit comme la seule histoire qui mérite d’être racontée en tant qu’histoire. Quelle différence d’attitude et de ton dans le livre de Pierre Bourdieu, Sociologie de l’Algérie (8), publié, comme L’Exil et Le Royaume, en 1958 : ses analyses réfutent les formules à l’emporte-pièce de Camus et présentent franchement la guerre coloniale comme l’effet d’un conflit entre deux sociétés. C’est cet entêtement de Camus qui explique l’absence totale de densité et de famille de l’Arabe tué par Meursault ; et voilà pourquoi la dévastation d’Oran est implicitement destinée à exprimer non les morts arabes (qui, après tout, sont celles qui comptent démographiquement), mais la conscience française. (...)

On dispose d’une excellente recension des nombreux postulats sur les colonies françaises que partagent les lecteurs et critiques de Camus. Une étude remarquable de Manuela Semidei sur les livres scolaires français, de la première guerre mondiale au lendemain de la seconde (9), note que ces manuels comparent favorablement l’administration coloniale de la France à celle de la Grande-Bretagne : ils laissent entendre que les possessions françaises sont gouvernées sans les préjugés et le racisme des Britanniques. Dans les années 30, ce thème est inlassablement répété.

Quand il est fait allusion à l’usage de la violence en Algérie, par exemple, la formulation donne à croire que les forces françaises ont été obligées de prendre des mesures déplaisantes pour répondre à des agressions de la part des indigènes « poussés par leur ardeur religieuse et par l’attrait du pillage ». L’Algérie est toutefois devenue « une nouvelle France », prospère, dotée d’excellentes écoles, d’hôpitaux, de routes. Même après l’indépendance, l’image de l’histoire coloniale de la France reste essentiellement constructive : on pense qu’elle a posé les bases de liens « fraternels » avec les anciennes colonies.

Mais ce n’est pas parce qu’un seul point de vue paraît pertinent à un public français, ou parce que la dynamique complète de l’implantation coloniale et de la résistance indigène flétrit regrettablement le séduisant humanisme d’une grande tradition européenne, qu’il faut suivre ce courant d’interprétation et accepter les constructions et images idéologiques.

J’irai jusqu’à dire que, si les plus célèbres romans de Camus intègrent, récapitulent sans compromis et, à bien des égards, supposent un discours français massif sur l’Algérie qui appartient au langage des attitudes et références géographiques impériales de la France, cela rend son œuvre plus intéressante, et non le contraire. La sobriété de son style, les angoissants dilemmes moraux qu’il met à nu, les destins personnels poignants de ses personnages, qu’il traite avec tant de finesse et d’ironie contrôlée - tout cela se nourrit de l’histoire de la domination française en Algérie et la ressuscite, avec une précision soigneuse et une absence remarquable de remords ou de compassion.

Une fois de plus, la relation entre géographie et lutte politique doit être réanimée à l’endroit précis où, dans les romans, Camus la recouvre d’une superstructure qui, écrit élogieusement Sartre, nous plonge dans le « climat de l’absurde ». Tant L’Etranger que La Peste portent sur des morts d’Arabes, des morts qui mettent en lumière et alimentent silencieusement les problèmes de conscience et les réflexions des personnages français.

Municipalités, système judiciaire, hôpitaux, restaurants, clubs, lieux de loisirs, écoles - toute la structure de la société civile, présentée avec tant de vie, est française, bien qu’elle administre surtout une population non française. L’homologie de ce qu’écrivent à ce sujet Camus et les livres scolaires est frappante. Ses romans et nouvelles racontent les effets d’une victoire remportée sur une population musulmane, pacifiée et décimée, dont les droits à la terre ont été durement restreints. Camus confirme donc et raffermit la priorité française, il ne condamne pas la guerre pour la souveraineté livrée aux musulmans algériens depuis plus d’un siècle, il ne s’en désolidarise pas.

Au centre de l’affrontement, il y a la lutte armée, dont les premiers grands protagonistes sont le maréchal Théodore Bugeaud et l’émir Abd El-Kader. Le premier est un militaire intraitable qui, dans sa sévérité patriarcale envers les indigènes, commence en 1836 par un effort pour les discipliner et finit une dizaine d’années plus tard par une politique de génocide et d’expropriation massive. Le second est un mystique soufi et guérillero infatigable, qui ne cesse de regrouper, reformer, remobiliser ses troupes contre un envahisseur plus fort et plus moderne.

Quand on lit les documents de l’époque - les lettres, proclamations et dépêches de Bugeaud (réunies et publiées à peu près au même moment que L’Etranger), ou une édition des poèmes soufis d’Abd ElKader (...), ou encore la remarquable reconstruction de la psychologie de la conquête par Mostafa Lacheraf, dirigeant du Front de libération nationale (FLN) et professeur à l’université d’Alger après l’indépendance, à partir des journaux et lettres français des années 1830 et 1840 (10) -, on perçoit la dynamique qui rend inévitable l’amoindrissement de la présence arabe chez Camus.

Le cœur de la politique militaire française telle que l’avaient mise au point Bugeaud et ses officiers, c’était la razzia, le raid punitif sur les villages, maisons, récoltes, femmes et enfants des Algériens. « Il faut empêcher les Arabes de semer, de récolter, de pâturer », avait ordonné Bugeaud. Lacheraf donne un échantillon de l’état d’ivresse poétique que ne cessent d’exprimer les officiers français à l’œuvre : enfin ils avaient l’occasion de faire la « guerre à outrance », sans morale, sans nécessité. Le général Changarnier décrit l’agréable distraction qu’il octroie à ses soldats en les laissant razzier de paisibles villages ; ce type d’activité est enseigné par les Ecritures, dit-il, Josué et d’autres grands chefs dirigeaient « de bien terribles razzias » et étaient bénis par Dieu. La ruine, la destruction totale, l’implacable brutalité sont admises non seulement parce qu’elles sont légitimées par Dieu, mais aussi parce que - formule inlassablement répétée de Bugeaud à Salan - « les Arabes ne comprennent que la force brutale ».

Certains, comme Tocqueville, qui par ailleurs critiquait sévèrement la politique américaine à l’égard des Noirs et des Indiens, estimaient que le progrès de la civilisation européenne nécessitait de faire subir des cruautés aux musulmans. Dans la pensée de Tocqueville, « conquête totale » devient synonyme de « grandeur française ». L’islam, c’est « la polygamie, la séquestration des femmes, l’absence de toute vie publique, un gouvernement tyrannique et ombrageux qui force de cacher sa vie et rejette toutes les affections du cœur du côté de l’intérieur de la famille ». Et, croyant que les indigènes sont des nomades, il estime que « tous les moyens de désoler les tribus doivent être employés. Je n’excepte que ceux que l’humanité et le droit des nations réprouvent (11) ». (...)

Les romans et nouvelles de Camus distillent très précisément les traditions, langages et stratégies discursives de l’appropriation française de l’Algérie. Ils donnent son expression ultime et la plus raffinée à cette « structure de sentiments » massive. Mais, pour discerner celle-ci, il nous faut considérer l’œuvre de Camus comme une transfiguration métropolitaine du dilemme colonial : c’est le colon écrivant pour un public français, dont l’histoire personnelle est irrévocablement liée à ce département français du Sud ; dans tout autre cadre, ce qui se passe est inintelligible.

Mais les cérémonies de noces avec le territoire - célébrées par Meursault à Alger, par Tarrou et Rieux enfermés dans les murs d’Oran, par Janine une nuit de veille au Sahara - incitent paradoxalement le lecteur à s’interroger sur la nécessité de ces réaffirmations. Quand la violence du passé français est ainsi rappelée par inadvertance, ces cérémonies deviennent, en raccourci extrêmement condensé, des commémorations de la survie d’une communauté sans perspective qui n’a nulle part où aller.

L’impasse de Meursault est plus radicale que celle des autres. Car, même si nous supposons que ce tribunal qui sonne faux continue d’exister (curieux endroit pour juger un Français meurtrier d’un Arabe, note à juste titre Conor Cruise O’Brien), Meursault lui-même comprend que tout est fini ; c’est enfin le soulagement - dans la bravade : « J’avais eu raison, j’avais encore raison, j’avais toujours raison. J’avais vécu de telle façon et j’aurais pu vivre de telle autre. J’avais fait ceci et je n’avais pas fait cela. Je n’avais pas fait telle chose alors que j’avais fait cette autre. Et après ? C’était comme si j’avais attendu pendant tout le temps cette minute et cette petite aube où je serais justifié. »

Plus de choix ici, plus d’alternative. La voie de la compassion est barrée. Le colon incarne à la fois l’effort humain très réel auquel sa communauté a contribué et le refus paralysant de renoncer à un système structurellement injuste. La conscience de soi suicidaire de Meursault, sa force, sa conflictualité ne pouvaient venir que de cette histoire et de cette communauté-là. A la fin, il s’accepte tel qu’il est - et il comprend aussi pourquoi sa mère, enfermée dans un asile de vieillards, a décidé de se remarier. « Elle avait joué à recommencer (...) si près de la mort, maman devait s’y sentir libérée et prête à tout revivre. » Nous avons fait ici ce que nous avons fait, donc refaisons-le. Cette obstination froide et tragique se mue en faculté humaine de se reproduire sans faiblir. Pour les lecteurs de Camus, L’Etranger exprime l’universalité d’une humanité existentiellement libre, qui oppose un insolent stoïcisme à l’indifférence du cosmos et à la cruauté des hommes.

Resituer L’Etranger dans le nœud géographique où prend naissance sa trajectoire narrative, c’est voir en ce roman une forme épurée de l’expérience historique. Tout comme l’œuvre et le statut d’Orwell en Angleterre, le style dépouillé de Camus et sa sobre description des situations sociales dissimulent des contradictions d’une complexité redoutable, et qui deviennent insolubles si, comme tant de ses critiques, on fait de sa fidélité à l’Algérie française une parabole de la condition humaine. Tel est encore le fondement de sa renommée sociale et littéraire.

Pourtant, il n’a cessé d’exister une autre voie, plus difficile et stimulante : juger, puis refuser la mainmise territoriale et la souveraineté politique de la France, qui interdisaient de porter sur le nationalisme algérien un regard compréhensif. Dans ces conditions, il est clair que les limites de Camus étaient paralysantes, inacceptables. Comparés à la littérature de décolonisation de l’époque, française ou arabe - Germaine Tillion, Kateb Yacine, Frantz Fanon, Jean Genet -, ses récits ont une vitalité négative, où la tragique densité humaine de l’entre prise coloniale accomplit sa dernière grande clarification avant de sombrer. En émane un sentiment de gâchis et de tristesse que nous n’avons pas encore entièrement compris. Et dont nous ne sommes pas tout à fait re

(1) Ecrivain britannique (1775-1817). Ses œuvres complètes viennent de paraître dans la « Bibliothèque de la Pléiade », Gallimard, Paris, 1 112 pages, 325 F.
(2) Lire François Brune, « Rebelle à Big Brother », Le Monde diplomatique, octobre 2000.
(3) Conor Cruise O’Brien, Albert Camus, Viking, New York, 1971.
(4) Joseph Conrad, Last Essays, Geography and some Explorers, J. M. Dent, Londres, 1926.
(5) Herbert Lottman, Camus, Seuil, Paris, 1985.
(6) Benjamin Constant, Adolphe, Gallimard, Paris, 1973 ; Gustave Flaubert, Trois contes, Seuil, Paris, 1993.
(7) François Mitterrand, Présence française et abandon, Plon, Paris, 1957.
(8) Pierre Bourdieu, Sociologie de l’Algérie, PUF, Paris, 1985, rééd.
(9) Manuela Semidei, « De l’Empire à la décolonisation à travers les manuels scolaires », Revue française de sciences politiques, vol. 16, n° 1, février 1966.
(10) Mostepha Lacheraf, L’Algérie : nation et société, Maspero, Paris, 1965.
(11) Alexis de Tocqueville, Œuvres complètes, t. V, Voyages en Angleterre, Irlande, Suisse et Algérie, Gallimard, Paris, 1958.

Tuesday, October 02, 2007

Les bons capitalistes chinois en passe de devenir les affreux exploiteurs de travailleurs

(Le Monde) : DSK, le nouveau directeur du FMI, qui doit prendre ses fonctions en novembre, en a profité pour rappeler sa vision du rôle de l'institution internationale qui doit, selon lui, résoudre "le problème de la mondialisation". Le FMI a notamment vocation à faire en sorte que "la Chine entre dans le jeu mondial et cesse de casser des marchés comme c'est le cas aujourd'hui, en proposant du travail moins cher que partout ailleurs, ce qui est à l'origine des délocalisations". "Si on veut du multilatéralisme, il faut quelqu'un qui réunisse les grandes puissances autour de la table, ça c'est le rôle du directeur du FMI", a-t-il indiqué.

Le "miracle chinois", le "boom chinois", le "dynamisme chinois" et tous les autres superlatifs qualificatifs dont on use pour la Chine ne sont vraiment pas ma tasse de thé, alors vraiment pas. Mais voir se lever petit à petit les critiques (cet été aux Etats Unis c'était la mode) de plus en plus fortes et surtout de plus en plus hypocrites des grands leaders des pays ocidentaux contre la Chine me donne la nausée. Tout d'un coup, parce que la puissance chinoise vient conccurencer les occidentaux chez eux, qu'elle devient incontournable, on fait mine de découvrir que les salariés chinois sont sous-payés, ne bénéficient pas des protections sociales, n'ont pas de droits syndicaux ; on découvre aussi que les chinois produisent mal et dangereusement, qu'ils polluent, etc... Tant que les principaux bénéficiaires étaient les grands capitalistes de l'Europe et de l'Amérique du Nord, on se souciait guerre des conditions de travail des ouvriers chinois. On était même très content que le régime autoritaire du parti communiste chinois face la police pendant que entreprises occidentales s'en mettait plein les poches sur le dos des chinois. Mais maintenant que les chinois, ayant bien appris la leçon capitaliste, viennent acheter des entreprises occidentales et commencent à dicter leurs conditions et leurs lois, ils deviennent des mauvais, des potentiels méchants.
De si brillants élèves qui ont intégré toutes les règles du libéralisme : baisse des coûts par les bas salaires et les horaires à rallonge, syndicalisme inexistant, système policier assurant l'ordre et la bonne marche des affaires (c'était un article du TCE ça tiens), qui se voient ainsi critiqués et menacés de sanctions. Depuis quand punit-on les bons élèves ? Pourquoi stigmatiser ceux qui appliquent à la lettre le bon dogme libéral ?
Ah cette grande hypocrisie capitaliste.

Il faut aussi remarquer que le DSK veut lutter contre les délocalisations. Plaçons d'un point vue purement libéral. Qui bénéficie des délocalisations ? Les pays du Sud, c'est à dire les pays pauvres principalement. Qui pâtit des délocalisations que DSK veut empêcher ? Les pays riches. DSK est président du FMI pour défendre les riches contre les pauvres. Il parait que son programme c'est de changer le FMI. Bon courage les pauvres !!

Et les méchants slovaques, polonais, hongrois, tchèques et bientôt roumains et bulgares, qui cassent les marchés en payant des salaires très bas et qui exonèrent les entreprises de tout impôt il va en faire quoi DSK ?

Monday, October 01, 2007

C'est ça la rénovation du PS ?

Il a osé le dire, Philippe Manière : "Le PS doit se réconcilier avec l'économie de marché". C'est dans le blog "Rénovation de la gauche" sur Libération. Mehdi Ouraoui, la personne qui tient le blog prend ça très au sérieux et écrit : "Inutile de dire que je ne suis pas d'accord avec tout : par exemple, la nécessité de se "réconcilier avec le marché", si souvent évoquée en ce moment, ne me paraît pas d'une urgence absolue pour un parti dont sont issus les patrons de l'OMC et du FMI."
Si on décode un peu la réaction d'Ouraoui. Les dirigeants de l'OMC et du FMI, deux des plus grandes organisations qui ont érigé le libéralisme (c'est à dire l'économie de marché) en dogme (pour le FMI c'est même de l'intégrisme néo-libéral dont le le gourou est Milton Friedman) sont deux socialistes du PS et Mehdi Ouraoui "ne voit pas la nécessité de se "réconcilier avec le marché". Il sont de sacrés blagueurs au PS !!

El Gusto, Taliani et…Joy Division

Je sais que ce titre semble incongru, mais voilà s’il y a un seul lien au monde entre El Gusto (châabi), Réda Taliani (rai) et Joy Division (punk), ben ce lien c’est moi.

Le concert d’
El Gusto fût super. Avec Abdelmadjid Meskoud comme maître de cérémonie et El Hadi El Anka comme chef d’orchestre. A travers les différentes chansons choisies pour la soirée, Meskoud en commentateur avisé nous a fait voyager à travers différentes villes d’Algérie par la magie des chansons. C’est ainsi que j’ai appris que l’une des plus belles chansons châabi, « Chehlet lâayani », a été composée par un chanteur de Cherchell ( je n’ai pas retenu le nom ). C’était très émouvant de voir les anciens élèves d’El Anka faire vivre cette musique châabi de façon si fraîchement actuelle. Les musiciens et chanteurs juifs étaient comme des poissons dans l’eau. René Perez, c’était comme si c’était hier, Luc Cherki était visiblement très ému et Robert Castel surprenant. J’ai déjà au ma dose d’émotion la première fois que j’ai entendu un pied-noir parler en arabe (et même en berbère) comme moi, mais avec El Gusto voir Robert Castel faire un istikhbar en arabe, c’est d’un autre calibre. Tous ont rendu hommage à El Hadj Mohamed El Anka, maître incontesté de la chanson châabi moderne. Les chansons châabi les plus courtes durent toujours autour 10 minutes, alors on est un peu surpris de les voir raccourcis. Mais Abdelmadjid Meskoud a comment faire les enchaînements par ses présentations des différentes chansons et leurs origines. En une heure et demi de temps de concert, c'est un très bon compromis.

Et Taliani ? Parce que depuis quelques jours, c’est des chansons de son dernier album (entre autres) qui tournent dans mon baladeur. D’ailleurs, n’est-ce pas une coincidence étrange que le chanteur rai le plus populaire depuis 2 ans en Algérie soit originaire d’une ville qui a aussi donné ses lettres de noblesse à la chanson andalou et châabi, à savoir Koléa.

Quand à Joy Division, parce que le film «
Control» sur la vie d’Ian Curtis, chanteur mythique de Joy Division est sorti la semaine dernière.

Le web 2.0 enrichit l'information